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Dates : d’octobre à avril.
Durée d'une séance : 1h00 à 2h00 selon les cours.
Les enseignements sont donnés en langue française.
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Modeler, graver, dessiner, former les contours d’une chose, d’un animal ou d’un être humain, littéralement donner corps, en grand, en petit, en 2D ou en 3D, permet à l’artiste d’affirmer son existence, et parfois sa domination sur le monde, de rendre visible ce qui ne l’est pas toujours et compréhensible l’inaccessible. La « révolution » néolithique est à cet égard un moment charnière. Alors que des changements économiques, technologiques et sociaux sans précédent bouleversent les modes de vie et les croyances de cette époque, de nouvelles formes de représentation apparaissent mettant en avant de manière parfois spectaculaire la figure humaine. Le Néolithique développe ainsi une image du monde très différentes des périodes précédentes mettant en exergue la femme et l’homme, la représentation d’objets-signes et de symboles récurrents. Des figurines des Balkans aux stèles gravées campaniformes, en passant par les vases gynécormorphes du Jura chasséen et les statues-menhirs rouergates, on peut interroger les différentes manières d’interpréter ces représentations et ces signes du Néolithique à l’aune des recherches récentes.
Introduction / représentations humaines et animales au début du Néolithique au Proche-Orient et en Asie |
La vie en miniature : figurations humaines et premières sociétés agricoles au Sud et à l'Est de l'Europe |
La Conquête de la Gaule par Jules César aboutit à l’intégration des Gaulois dans la sphère romaine. Sous le règne d'Auguste, la Gaule est divisée en plusieurs provinces, chacune dirigée par un gouverneur nommé par l'empereur. L’organisation territoriale mise en place par Agrippa prend la forme de la création de villes adoptant les caractéristiques de l’urbs romaine. L’archéologie préventive a contribué ces dernières années à mieux connaître ces centres urbains. Les chefs-lieux de cités sont reliés entre eux par un réseau routier et fluvial qui remonte souvent à l’âge du Fer. Le paysage rural se caractérise quant à lui par la présence de domaines agricoles, des villae dont les origines peuvent dater également de cette période. Les pratiques religieuses démontrent à la fois l’adoption du panthéon gréco-romain et le maintien de certains dieux gaulois, ainsi que la présence de divinités originaires d’autres régions de l’Empire. Dans les villes, ainsi que dans les campagnes, l’architecture des sanctuaires reflète ce syncrétisme. Les sculptures en pierre et en bronze mises au jour au sein de ces sanctuaires nous renseignent quant à eux sur les rites et la dévotion. La société gallo-romaine est dominée par des notables qui occupaient des postes de gouvernement, de l'administration et de l'armée. Les citoyens romains bénéficiaient de certains droits et privilèges, tels que le droit de vote et celui de posséder des terres. Ils étaient souvent des commerçants, des artisans ou des propriétaires de petites exploitations agricoles. Leur nom et parfois leur carrière sont connus par l’épigraphie et la sculpture. L’économie de la Gaule romaine repose en partie sur la richesse et la diversité des productions manufacturées. Les artisans gallo-romains étaient spécialisés dans une large gamme de métiers, notamment la poterie, la verrerie, la métallurgie, la bijouterie, dont les productions sont documentées en particulier par les ateliers, la sculpture ainsi que les dépôts funéraires.
Pendant près de trois millénaires, le trône du royaume égyptien a vu se succéder des centaines de rois accompagnés de leurs épouses. Celles-ci, selon leur rang, purent seconder le pharaon dans l’exercice du pouvoir, faciliter les transitions entre les règnes en tant que régentes et même exceptionnellement exercer pleinement la fonction royale. Incarnation de la déesse Hathor sur terre, épouse divine, mère désignée de l’héritier du trône ou encore diplomate, voire guerrière, le rôle de la reine est essentiel en Égypte pharaonique. En retraçant l’histoire de ces figures féminines au fil du temps, se dessinent les contours de l’évolution d’un statut complexe fait d’obligations politiques et religieuses. Des premières reines de la fin du quatrième millénaire avant J.-C. jusqu’à Cléopâtre au premier siècle avant J.-C., étudier l’image des souveraines des Deux Terres offre l’occasion de se pencher sur leur nature et de décrypter leurs gestes afin d’appréhender les enjeux du pouvoir royal.
premier semestre
Couleur et architecture au Ier millénaire av. J.-C.
Les arts de la couleur appliqués à l’architecture existent au Proche-Orient dès le Néolithique. Durant des millénaires, les bâtiments de prestige sont couverts de peintures qui permettent d’animer les larges surfaces disponibles d’une architecture principalement en brique crue. Les traditions architecturales du Ier millénaire av. J.-C. ne font pas exception mais se distinguent par le développement des techniques des arts du feu et des matières vitreuses (faïence, glaçure) appliquées à des éléments architecturaux de grande taille pour renforcer la pérennité et la brillance des décors. Le cours propose un tour d’horizon des grands décors glaçurés et peints principalement en Mésopotamie et Iran. Il révèle l’étonnante vitalité créatrice et la grande variété d’applications formelles et iconographiques, depuis les décors sériels des arts babylonien et achéménide jusqu’aux grandes compositions narratives assyriennes. La très haute technicité des décors obtenus s’y révèle fondamentale. On relèvera aussi l’importante spécialisation des artisans dans un contexte de concurrence des traditions techniques et de transfert des savoir-faire favorisés par l’intégration d’immenses territoires dans des empires capables de centraliser les moyens et de stimuler la demande.
second semestre
Urartu : la Transcaucasie et le plateau arménien à l’âge du fer (900-500 av. J.-C.)
L’Urartu est un puissant royaume de l’âge du fer constitué au IXe siècle av. J.-C. dont le territoire couvrait l’est de la Turquie actuelle, l’Arménie et le nord-ouest de l’Iran. Sa capitale, Tushpa, était située sur les rives du lac Van et le cœur du royaume englobait également le mont Ararat, dont le nom biblique perpétue celui de l’Urartu. L’histoire de ce royaume est caractérisée par sa lutte constante contre l’empire néo-assyrien qui essaya à maintes reprises de le conquérir. L’Urartu réussit à rester indépendant jusqu’à sa chute, probablement provoquée par les attaques des Scythes au début du VIe siècle av. J.-C. Si l’Urartu est le cœur de cette étude, les cultures qui le précèdent immédiatement, celles qui sont en contact avec lui et celles qui lui succèdent méritent d’être abordées. Ainsi sont abordées les cultures de Transcaucasie et du plateau arménien à l’âge du fer.
Située en Grèce centrale, au pied du mont Parnasse, Delphes, considérée comme le centre du Monde connu, abritait dans l’Antiquité le plus célèbre sanctuaire oraculaire dédié à Apollon. Cette année sera consacrée à l’étude des offrandes monumentales de la Delphes des époques hellénistique et romaine, du IIIe siècle avant J.-C. au IVe siècle après J.-C., période qui voit peu à peu se développer l'influence de nouveaux peuples comme les Etoliens puis la conquête par Rome du monde grec. A l’issue de la tentative d'invasion par les Celtes en 279 avant J.-C. puis avec les Guerres dites de Macédoine (214-146 avant J.-C.) le sanctuaire de Delphes se couvrit d’offrandes prestigieuses qui marquèrent le triomphe des nouveaux maîtres de la Grèce : la terrasse ornée des statues des rois de Pergame Attale Ier et Eumène II, le théâtre de Delphes et son décor revisité à l'époque de Néron, la statue équestre dressée sur un pilier orné de scènes de la bataille de Pydna érigée en l'honneur du général romain Paul Emile, le stade offert par le mécène Hérode Atticus ou la célèbre statue de culte dédiée à Antinoüs, divinisée après sa mort. Une occasion d’étudier et d’admirer les chefs-d’œuvre de l’architecture et de la sculpture grecques suscités par la commande romaine et d'analyser la vie d'un sanctuaire grec à l'époque impériale jusqu'à l'interdiction des cultes "païens".
premier semestre
Les sanctuaires d’Italie centrale entre l’époque classique et l’époque hellénistique (IVe-IIIe siècles av. J.-C.)
La fin de l’époque classique marque une période de reprise des aménagements des grands sanctuaires en Italie centrale. Dans la continuité du cours de l’année précédente, nous examinerons les caractéristiques nouvelles des grands sanctuaires d’Étrurie (Cerveteri, Véies, Orvieto…), du Pays falisque (Faléries) et du Latium (Rome, Ardée, Lavinium ou Nemi) : le profond renouvellement du langage figuré des décors en terre cuite mais aussi les nouveaux cultes et les nouveaux types d’offrande.
second semestre
La cité de Cerveteri entre l’époque classique et l’époque hellénistique
(IVe-IIIe siècles av. J.-C.)
Le phénomène de reprise qui caractérise le monde étrusque après la crise du Ve siècle av. J.-C. est particulièrement sensible dans la grande cité de Cerveteri, non seulement dans les nouveaux aménagements des sanctuaires et des autres espaces urbains, mais aussi dans le domaine funéraire, où l’aristocratie locale trouve des modes inédits de célébration des défunts et de leur famille. Nous verrons notamment comment l’architecture, le décor et le mobilier des grandes tombes aristocratiques exploitent les nouveaux modèles artistiques, empruntés à la Macédoine, à Tarente et aux autres centres du monde hellénistique.
premier semestre
Les sarcophages sculptés et leur décor (IIe–IVesiècles ap. J.-C.)
Le grand changement des pratiques funéraires autour de l’année 100, caractérisé par le passage de l’incinération, propre à l’âge du Fer en Europe occidentale, à l’inhumation, conduit le monde romain à inventer un objet nouveau : le sarcophage. Destiné à recueillir le corps des défunts, il donne rapidement lieu à une production de luxe, où le marbre, matériau privilégié des sculpteurs, tient la première place. Etudier ces sarcophages sculptés et leur décor, c’est se rendre attentif aux traditions d’atelier, aux évolutions stylistiques, et à l’interprétation des scènes et des décors figurés choisis par les officines de sculpteurs et appréciés par leurs clients.
second semestre
De Trajan à Théodoric et du Palatin aux villas et capitales impériales.
Avec les Antonins, la tendance de l’empereur à s’absenter de Rome s’accentue et apparaissent d’autres résidences que les villas suburbaines de Mécène, de Sperlonga ou d’Albano. L’une des plus célèbres est celle d’Hadrien à Tivoli mais, durant l’antiquité tardive, en fonction des événements qui nécessitent la défense de l’empire et aboutiront à son partage, d’autres résidences et capitales apparaissent, par exemple à Milan, à Ravenne, à Trêves, à Nicomédie et bien sûr à Constantinople. Cela étant et selon les époques, le Palatin continue d’avoir une existence propre ainsi que certaines villas suburbaines, comme le Sessorianum ou la Villa de Maxence sur la Via Appia.
Caractérisée par de profondes mutations, l’Antiquité tardive n’en constitue pas moins une période d’une richesse foisonnante. Prolongement ultime de la civilisation gréco-romaine, et annonce du monde médiéval, elle est avant tout marquée par le triomphe du christianisme. Dans ce contexte, la culture matérielle – en particulier l’étude de l’ameublement et de l’aménagement intérieurs - apparaît comme un champ d’étude idéal pour appréhender les usages privés ainsi que les pratiques religieuses d’une société en pleine évolution. Privilégier une approche pluridisciplinaire et prendre appui sur les indices matériels issus de contextes archéologiques croisés avec les sources iconographiques et textuelles permet de tisser des correspondances fructueuses. Les équipements, contenants et instruments variés, fruits d’artisanats spécialisés, sont les témoins de particularités régionales, d’appartenances sociales ou de croyances. Avec le développement de la religion chrétienne, et l’érection de basiliques à partir du IVe siècle, des dispositifs, adaptés du monde profane ou inédits (chancel, autel, ciborium, ambon), ont permis de structurer l’espace ecclésial et de répondre aux nouveaux besoins de la liturgie.
Les armes blanches évoluent dans leur fabrication, leur emploi, leur évolution et leur décoration, de l’Antiquité à l’émergence des premiers règlements standardisant ces instruments. Objet d’usage, mais aussi objet de prestige, l‘épée est autant le reflet des conditions du combat que le marqueur de l’évolution du goût et du statut de son porteur. Plus modestes, les armes d’hast évoquent l’essor et la spécialisation de l’infanterie, d’où sortira la révolution tactique du XVe siècle. Des pratiques sont spécifiquement liées aux armes blanches, comme le duel ou les rituels religieux, funéraires ou politiques auxquels elles sont associées. Certaines armes blanches sont associées à des autorités : épées d’investiture, regalia, armes personnifiant des institutions, des offices, des villes ou des corps constitués, sans oublier le cas très spécifique des armes de justice. Elles ne sauraient faire oublier les armes de chasse.
La Corée du Joseon (1392-1910), trop souvent considérée comme « Royaume Ermite », connait une incroyable période de recherche de nouvelles influences dans le développement des arts, des sciences et des lettres au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles. Les artistes, penseurs et scientifiques coréens vont au Japon, en Chine, rencontrent en particulier des jésuites. En résulte la formation d’un art tout à fait singulier, associé à un savoir néo-confucéen, identifié sous le terme générique de « nature morte ». Divers types de peinture peuvent être rassemblés sous l’appellation « peinture coréenne décorative (Jangshikhwa ¿¿¿) » car la forme du paravent est privilégiée. Le paravent aux livres chaekgeori (ou ch’aekkori), littéralement « livres et objets », est en particulier, à la fin de la période Joseon, un genre très apprécié. Les collections de peintures coréennes du musée Guimet (Charles Varat, Colin du Plancy, Lee Ufan), confrontées à des collections coréennes, et européennes, peuvent changer notre regard sur cette peinture souvent minorée, rangée sous le terme générique de Minhwa, ou peinture populaire, voire folklorique, qui aura comme impact de transformer cet art de cour en créations artistiques régionales, jouant avec le surnaturel au cours du XIXe siècle. L’art coréen peut aussi être comparé à la peinture humaniste de la Renaissance, à la nature morte néerlandaise, aux surréalistes belges ainsi qu’aux peintures jésuites à la cour de Chine. L’étude de la pratique de la collection, ou encore des mobiliers de rangement des livres, d’objets, en Chine, autant qu’en Corée peut également enrichir le sujet, jusqu’à une dimension contemporaine (la pop-culture). En outre, les artistes de Corée du Sud revisitent ces sujets, et l’intègrent dans des thématiques qui sont associées aux transformations de la société.
Dans l’ensemble du monde himalayen, tout spécialement au cœur de la sphère culturelle de l’ancien Tibet, un art pictural de prime abord complexe et déconcertant porte les concepts symboliques les plus élevés de la spiritualité du bouddhisme dit du « véhicule de Diamant » (vajrayana). Au pays des Neiges, ainsi que les Tibétains eux-mêmes désignent leur pays, le principe salvifique d’accès à l’Éveil se décline en images contrastées et spectaculaires : divinités de méditation (ishta devata), déités gardiennes de la doctrine (dharmapala), méritants (arhat), grands accomplis (mahasiddha), bouddhas victorieux (jina), grandes figures historiques, tels les dalaï-lamas, et bien d’autres encore. Désignées par le terme de thangka (« chose que l’on déroule »), les peintures sur support textile du monde himalayen offrent ainsi un répertoire presque infini de formes, élaborées selon des normes et des règles iconographiques rigoureuses par des artistes le plus souvent anonymes. Ces derniers, moines ou laïcs, s’exprimaient dans un esprit respectueux des traditions des grandes lignées spirituelles dans la filiation desquelles telle ou telle image était réalisée. Par ailleurs, l’immensité du territoire de haute Asie sur lequel s’étendit et se développa le vajrayana, de même que ses liens avec l’Inde, le Népal, le Cachemire, l’Asie centrale, la Mongolie ou la Chine, participent de la richesse stylistique et de la diversité des esthétiques qui s’y sont exprimées, interpénétrées et renouvelées, au gré des vicissitudes d’une histoire aussi complexe que tourmentée. En se fondant sur les recherches les plus récentes et à la lumière d’œuvres conservées dans la section des arts du Monde himalayen au musée Guimet, mais aussi dans divers musées étrangers ou au sein de collections privées, il est possible de dresser un tableau raisonné de quelque 800 ans d’évolution de « l’art des thangka », des environs du XIe siècle jusqu’au XIXesiècle.
La construction du Dôme du Rocher (Qubbat al-Sakhra) fut achevée vers 691 ap. J.-C., sous le règne du calife omeyyade Abd al-Malik. Edifié sur l’esplanade de l’ancien temple de Jérusalem, le monument a subi, aux périodes médiévale et moderne, des transformations qui n’ont que partiellement modifié son aspect initial et portent témoignage de l’attention dont il a continument fait l’objet. Son plan, inchangé, ainsi que les éléments préservés de son décor originel, le rattachent à l’architecture chrétienne tardo-antique de Terre sainte et à d’autres monuments islamiques de l’époque omeyyade. Sa signification, complexe et évolutive, à la fois religieuse et politique, a suscité des interprétations variées et parfois contradictoires, fondées sur l’analyse du contexte historique qui l’a vu naître, de sources écrites d’époques diverses, de son épigraphie et sur une approche sémiotique. Sa puissance symbolique a aussi généré de nombreuses représentations, fidèles ou approximatives, produites dans le monde islamique et au-delà.
premier semestre
Savoirs, savoir-faire et usages
Prenant appui sur des contextes culturels variés à travers le continent, des natures d'objets diverses et des travaux d'anthropologues et historiens de l'art récents, il est possible d’aborder des corpus d’œuvres sous l'angle, peut-être de prime abord paradoxal, de leur immatérialité. Depuis les cadres conceptuels qui président à leur création jusqu’aux matériaux employés, chargés de sens, et enfin à leur usage défini et circonscrit, il s'agit d'envisager la forme non pas comme une fin en soi mais comme révélatrice d'un système de pensée qui prévaut et légitime son existence.
second semestre
L’invention des arts d’Afrique
Alors qu’un intérêt européen pour les objets venus d’Afrique s’était manifesté à partir du XVe siècle, l’histoire des arts d’Afrique s’est développée en Europe puis aux États-Unis entre développement de l’ethnographie et du marché de l’art à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, alors que la colonisation s’intensifie. On peut analyser les étapes de la mise en place des discours et des regards sur les artefacts africains en fonction des typologies d’objets auxquels les Européens ont accès et des conditions d’observation et d’acquisition, cela du XVe jusqu’au tournant du XXe siècle. Ce faisant, il est possible d’analyser comment les objets, témoins matériels des sociétés du passé, rendent possible leur histoire mais la contraignent aussi. Il s’agit ainsi de mettre en place les fondements d’une l’histoire de l’histoire des arts de l’Afrique en posant les cadres théoriques nécessaires aux apprentissages présents et futurs sur le sujet.
Le pouvoir des sociétés complexes de la Mésoamérique réside dans la judicieuse et savante manipulation et dissémination de nombreux aspects symboliques, religieux, politiques, voire cosmologiques. Ces divers éléments – s’imbriquant souvent les uns dans les autres – sont élaborés principalement à la suite de connaissances approfondies du milieu naturel, du comportement des animaux et de la croissance des plantes, de la saisonnalité, de la météorologie, du déplacement des corps célestes et du savoir vernaculaire. Au travers d’un survol de certaines de ces civilisations sur près de 3000 ans d’histoire, des Olmèques aux Mexicas, l’accent est mis sur l’exploration de ces concepts tant du point de vue de la culture matérielle que dans ses aspects rituels, idéologiques, économiques et sociaux. On peut ainsi aborder les thèmes suivants : les bases du développement de la complexité sociale, la construction du pouvoir et de l’autorité, le symbolisme et l’idéologie, la religion et le pouvoir, enfin, de la représentation à la performance, l'iconographie et le rituel.
Comment rendre raison de la superposition des temporalités dans l’histoire de l’architecture ? Une approche fonctionnelle des édifices invite à les considérer non seulement comme des indicateurs des basculements esthétiques de leur époque, mais aussi à les inscrire dans le temps long. Les architectures religieuses permettent une approche des édifices liée à leur usage. Marqués, souvent, par une permanence fonctionnelle presque exclusive, les édifices, sous leur forme actuelle ou précédente, servent parfois depuis plus de dix-sept siècles à l’exercice du culte. Ainsi, pour comprendre les architectures sacrées du Moyen-Âge jusqu’à nos jours, la connaissance du modèle des basiliques paléochrétiennes est essentielle. Mais l’architecture religieuse est aussi marquée par de grandes ruptures civilisationnelles comme l’affirmation de la féodalité, la Renaissance, les Révolutions. Elle épouse les grandes réformes entreprises par l’Église catholique depuis les Moyen-Âge, tout comme celles menées par les Églises réformées, à l’époque moderne. Ainsi, l’architecture religieuse ne peut se réduire aux seules évolutions esthétiques ou techniques, pour déterminantes qu’elles soient. On peut, à travers une étude diachronique des architectures religieuses, les inscrire dans une histoire des croyances et des sociétés afin de mieux comprendre les mutations de leur style architectural, les enjeux techniques de leur construction et leur rapport avec leur contexte, qu’il soit rural ou urbain. La démarche s’appuie à la fois sur une relecture thématisée des grands exemples architecturaux et sur la découverte d’édifices moins connus afin d’élargir la typologie prise en compte.
Sculpteur admiré et célébré dans toute l’Europe de la fin du XVIIIe et du début du XIXesiècle comme un rénovateur de la grande tradition classique, Antonio Canova (1757-1822) a livré un œuvre souvent réduit à une traduction stricte des préceptes théoriques néo-classiques. Sa production est cependant bien plus complexe et ambiguë, le beau s’alliant à la violence, la froideur à la sensualité, au travers de figures mythologiques masculines et féminines, transfigurées par son aptitude à travailler le marbre. Canova a-t-il pour autant fait école ? A-t-il eu des rivaux ? des détracteurs ? Dans une Europe où l’instabilité politique met à mal les structures traditionnelles des Beaux-Arts, où Rome et Paris sont en concurrence, différentes générations de sculpteurs sont confrontées à la nouveauté de cette esthétique canovienne. En France, Clodion et Houdon achèvent leur carrière alors que Chaudet, Cartellier, Lemot, Bosio, Chinard font leurs débuts avant de voir s’épanouir les talents de Pradier et de David d’Angers. Dans les états allemands, Schadow et Dannecker fondent de nouvelles écoles régionales de sculpture. En Angleterre, Flaxman développe une tendance primitiviste et puriste du néo-classicisme alors que Gibson, Wyatt, Westmacott tendent à plus de naturalisme. Enfin, à Rome même, le danois Thorvaldsen, adepte d’un style qualifié d’austère et d’abstrait, est à la tête d’un important atelier. L’étude des œuvres, des réseaux et des stratégies de carrière de ces artistes nous amèneront ainsi à définir un paysage artistique riche mais uni par la quête d’un beau idéal.
Dans l’architecture et dans le décor des grandes demeures baroques du XVIIe siècle, les images jouent un rôle essentiel en tant que symboles et instruments du pouvoir absolu (iconographie de célébration). Le passage au Rococo est marqué par l’abandon de leur valeur idéologique au profit d’une valorisation des capacités techniques et inventives de l’artiste (la bravura), des effets de fiction et d’artifice, de la variété, de l’attrait sensuel pour la belle matière. Dans les palais et les appartements, la taille des pièces se réduit, au profit d’une plus grande attention portée à l’agencement, au confort et à la fonctionnalité. De nouvelles expérimentations, au cours du XVIIIe siècle, proposent une grille classiciste rigoureuse, en opposition aux infractions désinhibées du style rocaille. Si l’aménagement d’intérieur est considéré au XVIIIe siècle comme un ensemble organique - dont l’unité comprend les stucs, les boiseries, les objets d'art…-, la relation entre architecture et nature - sous ses diverses formes, de la nature peinte à la nature réelle, en passant par le jardin - prend alors une nouvelle importance. Il s’agit de mettre en lumière cette époque de transitions à partir de cas d’étude spécifiques, avec une attention particulière portée aux deux pays, la France et l’Italie, qui se disputent alors la primauté artistique européenne.
Le verre est un matériau connu et employé depuis l’Antiquité ; il reste de nos jours un support d’expression artistique tout autant qu’un matériau omniprésent dans nos sociétés. Il est utile, dans un premier temps, de rappeler les principaux jalons de l’histoire technique et artistique des productions verrières, pour approfondir l’art du verre au XIXe siècle, jusqu’à la veille de la Première Guerre mondiale. Ce matériau, entre les références puisées dans les formes du passé et les recherches esthétiques de l’Art nouveau, connaît des évolutions variées. Il se décline aussi selon une grande diversité formelle : pièces de forme mais également verre plat, emploi en vitrail, en mosaïque. La place du verre s’affirme dans la question, centrale à la fin de XIXe siècle, de l’affaiblissement des limites entre disciplines artistiques et traditionnelles. La question de la présence du verre en architecture est à cet égard loin d’être négligeable : ce domaine permet d’aborder les nouvelles formes et usages du verre apparus au cours de la période.
Cristóbal Balenciaga (1895-1972) est unanimement considéré comme l'un des créateurs de mode les plus influents du XXe siècle. Perfectionniste infatigable, le couturier a acquis une maîtrise absolue de la technique et a consacré sa vie à perfectionner la construction de ses créations, évoluant toujours vers la simplicité et la pureté des formes. Surnommé par Christian Dior « notre maître à tous », Cristóbal Balenciaga a redéfini la relation entre le corps et le vêtement et a conçu une nouvelle silhouette, l'une de ses plus grandes contributions à l'histoire de la mode. La vie et l'œuvre de Cristóbal Balenciaga sont intextricablement liées, depuis sa formation et les premières années de sa vie professionnelle à Saint-Sébastien dans les années 1920 et 1930, jusqu'à son installation à Paris en 1937 et l’établissement définitif de son aura dans la mode internationale. Outre son extraordinaire développement technique et commercial, il s’agit d’étudier l'évolution de sa vision innovante du corps et de la silhouette, qui nourrit encore aujourd'hui les réflexions sur le dialogue entre art et mode.
Michel II Corneille, François Verdier, René Antoine Houasse, Bon et Louis de Boullogne, Charles de la Fosse, Noël et Antoine Coypel, Jean Cotelle, mais aussi les peintres de paysage et ceux de fleurs… cette génération d’artistes, après avoir œuvré au château de Versailles, dans les grands appartements du roi et de la reine sous la direction de Charles Le Brun, poursuit sa carrière en particulier dans les maisons royales, loin des fastes du château. Sur les commandes de la deuxième partie du règne de Louis XIV (1688-1715), les travaux d’Antoine Schnapper demeurent les références fondamentales. En remettant à l’honneur ces peintres quelque peu effacés par la personnalité géniale et tentaculaire de Charles Le Brun, il a ouvert la voie à leur étude plus systématique ces dernières décennies, sous la forme de monographies ou d’expositions, ce qui reste toutefois à approfondir et à compléter pour plus d’un artiste. L’étude des commandes de ces tableaux, souvent des séries destinées aux résidences de plaisance, permet de mettre en évidence le style de chaque artiste, mais aussi leur vision commune de la représentation. Cette production du tournant des XVIIe-XVIIIesiècles peut-elle simplement être analysée comme un avant-goût de la peinture d’agrément du XVIIIe siècle ou bien une période de création qui, en soi, a sa propre originalité répondant aux exigences d’un type particulier de décor ? Réévaluer la production de la deuxième partie du règne de Louis XIV conduit à reprendre la carrière de ces artistes tant sur le plan stylistique qu’institutionnel, en s’appuyant sur les sources déjà connues ou inédites et sur l’historiographie à notre disposition.
Motivés par une nouvelle conception de la Nature, les acteurs de l’École anglaise de peinture qui émerge au cours du XVIIIe siècle ont instrumentalisé le genre du paysage au service de la représentation d’une nature précise et reconnaissable. Selon eux, la tâche de l'artiste "moderne" est de représenter la Nature telle qu'elle est, non plus telle qu'elle devrait être ou telle qu'elle a pu être (Paradis perdu). Les paysagistes anglais ouvrent l'éventail des catégories esthétiques, ajoutant au "Beau" les catégories du "Sublime" et du "Pittoresque", permettant d'introduire une grande diversité de "sentiments naturels", et de chercher la "vérité" de la Nature. Au début du XIXe siècle, au prix d’une expérimentation incessante (dessin, aquarelle, encre, huile, gravure), l'art du paysage anglais atteint son apogée, grâce notamment à deux artistes exceptionnels, John Constable (1776-1837) et Joseph Mallord William Turner (1775-1851), qui imposent en Europe le genre du paysage comme la nouvelle peinture d'histoire. Au même titre que le portrait et pour les mêmes raisons, le genre du paysage demeurera par la suite la signature principale de l‘École anglaise, que ce soit avec les Préraphélites dans la seconde moitié du XIXe siècle, ou avec les modernistes de la première moitié du XXe siècle. Jardins paysagers et scènes de paysage permettent aux artistes de représenter l’Empire, jusqu’à son effondrement suite aux grandes fractures des deux guerres mondiales, dont ils représentent aussi les dévastations de façon exceptionnelle. Par la suite, le paysage a gardé une position essentielle dans l’École anglaise, notamment pour représenter les nouvelles scènes de la vie urbaine mais aussi en se développant à nouveau grâce à diverses expérimentations (photographie, vidéo, numérique, land art).
Bernin a un destin, celui de la gloire. Artiste prodige, à tout juste dix ans, il est présenté au Pape face auquel il dessine et qui reconnaît en lui un nouveau Michel-Ange. De ce jour à sa mort, son destin reste lié aux exigences de magnificence des souverains pontifes. Par son talent, son labeur, par son aptitude généreuse à travailler avec autrui, Bernin modifia plus que nul autre le panorama monumental de Rome et bouleversa l’art occidental. Mais Bernin a une aspiration, à l’introspection, à la transcendance. Sa vie recèle des difficultés à la hauteur de ses grandeurs et le mène dans une quête constante de vérité. Ce « génie », cette sensibilité, capacité prodigieuse à rendre compte de la Nature dans son maximum de beauté, peuvent être appréhendés à travers l’étude des traces les plus sensuelles et intellectuelles peut-être de son œuvre : ses dessins. Car Bernin, tout à la fois sculpteur, peintre, architecte, urbaniste et scénographe, fut, dans la pratique de chacun de ces arts, un immense dessinateur. Ainsi peuvent être posées les questions de l’émulation des maîtres et de Michel-Ange en particulier, par la confrontation de leurs dessins ; de la stature et de l’originalité de la figure de l’artiste Bernin, par comparaison avec les dessins d’autres « artistes-princes » du XVIIe siècle : Rubens, Van Dyck, Le Brun, … ; question du naturalisme, de ce très contemporain respect de la Nature, à préserver plutôt qu’à dompter chez Bernin, de la prégnance des mathématiques et des idées d’un grand contemporain, Galilée ; question du portrait, entendu comme recherche du visage et dépassement du masque ; de la dévotion, tout à la fois intime et spectaculaire ; question de l’amitié et de la générosité à travers les œuvres de ces artistes nombreux (Johann Paul Schor, Giovanni Battista Gaulli, Guglielmo Cortese, ...) qui l’épaulèrent dans ses projets et créèrent dans son style et souvent sur ses idées : mobilier, carrosses, grands décorations peintes et sculptées.
Les xylogravures japonaises offrent un large aperçu de la culture urbaine de l’époque Edo (1603-1868) et de son évolution jusqu’à l’ère moderne, révélant les plaisirs éphémères des citadins ainsi que leur engouement pour le théâtre, la littérature, l’histoire et la légende. Après une introduction dédiée à la fabrication et aux aspects techniques, il s’agit de porter les regards sur une ample sélection de gravures réalisées par les grands maîtres de l’ukiyo-e, comme Suzuki Harunobu, Katsukawa Shunsho, Torii Kiyonaga, Kitagawa Utamaro, Toshusai Sharaku, Katsushika Hokusai, Utagawa Kunisada et Utagawa Hiroshige. Les œuvres font l’objet d’une présentation thématique, visant à analyser différents sujets, parmi lesquels figurent les belles dames, les acteurs, les héros populaires, les lutteurs de sumo, les enfants, les fantômes et les sites célèbres. La dernière séance, au Département des Estampes et de la photographie de la BnF, sera dédiée à la présentation des originaux.
On fait souvent naître l’art moderne du divorce entre l’image et la littérature à laquelle elle aurait été trop longtemps subordonnée. Depuis la Renaissance et son Ut Pictura Poesis, la peinture d'histoire s'était efforcée de s'assimiler les règles et les finalités de la poésie et du théâtre antiques. En vertu de la conception humaniste des arts, la peinture devient parole muette et se veut la « sœur » de la rhétorique. Aussi le tableau sacré ou profane prend-il souvent l’apparence d’une scène ouverte au jeu des passions humaines, des plus douces aux plus terribles, et favorise-t-il la traditionnelle catharsis. On attend d’une peinture savante qu’elle respecte scrupuleusement sa source textuelle, construise l’action et conduise ses protagonistes avec une efficacité entrainante, voire édifiante. « Lisez l’histoire et le tableau, écrit Poussin à Chantelou, afin de connaître si chaque chose est appropriée au sujet. » En vérité, le lien entre peinture et rhétorique a toujours été de tension plus que d’harmonie, les peintres prenant vite conscience des particularités de leur médium et de la force supérieure du visible sur le spectateur. Cette conscience d’une spécificité des arts visuels se creuse à la fin du XVIIIe siècle. A mesure que le génie individuel entend rivaliser avec le cursus institutionnel, et l’image avec le texte, les peintres redéfinissent l’ancien dialogue des muses et n’empruntent plus nécessairement leurs sujets à la littérature. Mais cette redéfinition n’équivaut pas, loin s’en faut, à la pleine autonomie qu’on associe souvent aux révolutions de la peinture française. A partir des exemples de David, Girodet, Ingres, Delacroix, Chassériau, Gustave Moreau, Manet, Picasso et Matisse, on peut réévaluer la part de « l’ancien monde » dans l’art des modernes.
Au début du XXesiècle, apparaît une nouvelle science de l’image, l’iconologie, qui, fondée sur l’étude du traitement d’un sujet, analyse les conditions de production d’une œuvre d’art et son inscription dans une temporalité. A la même époque, les artistes semblent, pourtant, se détourner du sujet pour se concentrer davantage sur les problèmes inhérents à la peinture et développer de nouvelles techniques. Mais les papiers collés et les assemblages cubistes et, à leur suite, ceux des dadaïstes et des surréalistes, content toujours une histoire enracinée dans les matériaux utilisés et dans leur juxtaposition improbable. L’image figurative se vide, quant à elle, parfois, de son sens pour se faire motif (Matisse). Elle peut aussi résulter de l’appropriation des formes de cultures extra-occidentales ou de la citation d’œuvres d’art antérieures et, comme le collage, parler de ses sources tout en inventant de nouveaux récits (Picasso). Mise au service d’utopies révolutionnaires (constructivisme, muralisme mexicain etc.), l’image peut devenir le vecteur d’une propagande lorsqu’elle est rattrapée par l’histoire. Enfin, née avec le siècle dernier, l’abstraction revendique d’abord un contenu spirituel (Kupka, Kandinsky) puis lorsqu’elle ne veut plus rien dire d’autre que ce qui la constitue (le plan, la couleur et la ligne), elle laisse néanmoins transparaître une certaine conception de l’espace et du temps (Mondrian, Malevitch). Traces laissées sur la toile par les gestes de l’artiste, elle exprime encore, après la seconde guerre mondiale, le corps et ses déchirements (Pollock).
En 1967, pour une exposition au Musée des Arts Décoratifs à Paris, le critique Gérald Gassiot-Talabot a identifié une tendance, qu’il a contribué à qualifier de « Figuration narrative ». Si les œuvres concernées amènent à repenser les moyens visuels en regard des mises en œuvres textuelles, c’est qu’elles entendent signifier un certain rapport au monde contemporain, comme le font, à leur manière, les artistes réunis par Harald Szeemann à l’occasion de la Documenta V de 1972 (Cassel), dans la catégorie des « Mythologies individuelles », qu’il présentait comme le « lieu spirituel où un individu dispose les signes, symboles et signaux qui signifient le monde pour lui ». Cette conception de la création, en prise avec la pensée de l’époque (des Mythologies de Roland Barthes à La Pensée sauvage de Claude Lévi-Strauss, en passant par la micro-histoire élaborée autour de Michel Foucault) a participé d’une transformation profonde de la figure de l’artiste dont nous étudierons les différentes incarnations et mises en scène. De Sophie Calle la conteuse, personnage central des Histoires vraies qu’elle trame inlassablement d’œuvres en livres, à l’orchestration par Pierre Huyghe d’expositions-rituels mettant en œuvre les fictions sensibles qu’il imagine, différents types de récits ont été imaginés par les artistes depuis les années 1960 jusqu’à aujourd’hui : en les mettant en relation avec la diversité des mediums mis en jeu (de la peinture à la performance), en analysant l’incidence des discours et du langage dans leur élaboration et leur réception, en les considérant à la lumière de la dématérialisation de l’objet d’art théorisée par Lucy Lippard, en les étudiant au regard de l’inflation du virtuel et de la médiatisation de l’expérience, en les envisageant au prisme de l’autofiction et de la personnalisation de l’art mais aussi à l’époque du story-telling et de l’auto-promotion de soi, en résonance avec la place de l’individu dans la société et les questions philosophiques autant qu’éthiques de la sincérité et de la vérité.
Par nature, la photographie est multiple. Son statut et les regards portés sur elle ont évolué et vont évoluer. Avant d’être accrochée aux cimaises du musée, la photographie a le plus souvent connu mille vies. L’aspect volumétrique et pléthorique du médium, consubstantiel à son invention par Nicéphore Niépce (prise de vue, reproduction, impression et diffusion) encourage à dispenser des enseignements multiples. La photographie est partout et tout le monde fait de la photographie. Si la photographie peut être un art, elle peut aussi être un art appliqué au service d’usages éditoriaux, scientifiques, publicitaires, judiciaires… Médium où la technique occupe souvent une place centrale, la photographie est le produit d’intentions multiples et changeantes qui génèrent moult pratiques. Les expositions ou les catalogues de collections photographiques rassemblent souvent presque exclusivement des chefs d’œuvre isolés, dont les critères de choix sont à questionner alors que les conditions originales de leur production sont souvent ignorées voire écartées. Tandis qu’actuellement, 60 000 « photos » sont produites dans le monde chaque seconde, soit plus de 5 milliards par jour, cette année 2024-2025 propose, à travers de très nombreux exemples, de décrypter le parcours des photographies de la prise de vue à l’exposition : commande, supports de publication et mode de diffusion, choix par l’auteur ou par des intermédiaires (directeurs artistiques, rédacteurs, iconographes, conservateurs du patrimoine, commissaires, …). La multiplicité des exemples choisis est à l’aune du foisonnement intrinsèque au médium.
Depuis son invention à la fin du XIXe siècle, le cinéma a tissé de nombreux liens avec l’histoire de l’art et a contribué à la formulation d’un regard moderne. Les artistes des premières avant-gardes se sont très rapidement emparés du cinématographe pour en explorer les propriétés et en détourner les fonctions, inaugurant par la même un nouveau régime visuel. Il est désormais admis que le cinéma a accompagné le développement des pratiques artistiques et profondément influencé la manière de penser avec les images. Nous aborderons au cours de cet enseignement la place et le rôle de l’image en mouvement dans la création artistiques et dans les récits de l’histoire de l’art. Il et donc question de réévaluer l’importance de ces cinématographies puisées dans les périphéries relatives du modernisme (du cinéma d’avant-garde au film sur l’art, en passant par des formes cinématographiques narratives) sur la création artistique moderne et contemporaine, mais également d’envisager comment ces dernières nous invitent à requalifier notre rapport aux images, ainsi que d’en écrire l’histoire à l’ère de la dématérialisation de l’œuvre d’art.
Les pratiques conservatoires contemporaines se déclinent de multiples manières dans les sociétés contemporaines. Des attachements aux « objets souvenir » personnels à l'élection au rang de patrimoine culturel d'éléments matériels ou immatériels (culturels et naturels), les plus divers, se déploie la large palette des affections patrimoniales. La question se pose de savoir comment l'intime intervient dans la construction d’une valeur symbolique patrimoniale et les enjeux socio-politiques de la mobilisation des émotions. On peut y répondre à partir des situations de terrain ethnographique qui conduisent des objets domestiques aux éléments du patrimoine bâti en passant par des musées, des forêts, des savoir-faire ou des pratiques culturelles dites immatérielles. Ce faisant, il s’agit d’interroger les enjeux liés aux usages sociaux du patrimoine, la manière dont les temporalités y sont manipulées en considérant les réparations du présent (commémorations, restaurations, restitutions) sous-tendues derrière ces usages socio-politiques du passé et les futurs qu’elles proposent.
La représentation animalière, en peinture, en sculpture, ou dans toute autre technique artistique, est familière aux visiteurs de musées de Beaux-Arts, mais aussi de musées d’histoire naturelle, sans compter les petits musées qui, dans différents contextes régionaux, allient les arts et les sciences. La modalité la plus troublante de la présence animalière, dans les salles d’exposition permanente ou temporaire, est incontestablement celle des animaux taxidermisés, ou, comme on le dit familièrement, « empaillés ». Le genre animalier, en raison de sa faible portée morale, fut défini par Félibien comme l’un des moins dignes d’intérêt. À cette hiérarchisation par sujet – car l’histoire de l’art est affaire de hiérarchies – s’ajoute la considération de l’œuvre en fonction de son support, du médium employé, de la réputation de l’artiste l’ayant réalisée, ou encore du lieu dans lequel elle est conservée. Selon ce système hiérarchique, la taxidermie ne devrait que bien peu retenir l’attention de l’historien de l’art. Ce cycle vise précisément à interroger ces systèmes de valeurs. En retraçant la place de la taxidermie dans la culture visuelle de l’époque contemporaine, ce programme permet de questionner la place à accorder à l’illusion du vivant, de l’espace domestique à l’institution muséale.